À l'heure où je vous écris mon manuscrit se trouve sur le bureau de l'éditeur. Il est parti avec un petit "clic" douloureux.
C'est la première fois que j'envoie un manuscrit en "pièce jointe". Parti comme une vulgaire facture, il a traversé le monde virtuel avec un grand courage, alors que l'auteur se sent amputé et orphelin.
L'éditeur m'a répondu qu'il allait le lire "tranquillement" et me contacter à mon retour d'Angleterre la semaine prochaine. C'est vrai que je possède l'éditeur le plus gentil, le plus patient, le plus compréhensif qui existe dans ce monde impitoyable de l'édition. Mais mis à part quelques paragraphes, il ignore tout de ma façon de traiter ce projet, et je m'attends à une crucifixion en règle. D'ailleurs pour devancer le supplice attendu, je lui ai parlé d' "ébauche" plutôt que de manuscrit.
Vous aurez compris que je suis au trois-quarts immergée dans un océan d'angoisse. Reste à savoir si l'éditeur va me tendre une main secourable, ou appuyer doucement sur ma tête pour me faire disparaître dans une sorte de Titanic littéraire.
Demain soir je serai à Stratford-upon-Avon. J'ai demandé à Shakespeare de me préparer "a stiff gin and tonic."
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