La semaine dernière nous sommes montés à Paris, un aller retour le plus rapide possible, car je m'aperçois que je ne supporte plus, mais plus du tout, la grande ville. Pourtant Paris a toujours été mon coup de coeur, la ville la plus magique, la
plus belle, la plus romantique. Plus excitante que Londres, plus capricieuse que Rome, (mes deux autres favoris), mais Paris ne me séduit plus. J'ai besoin de campagne, de calme, de verdure, de voir les collines de l'Ardèche et les contreforts des Alpes, de surveiller les animaux et voir pousser les fleurs. C'est assez catastrophique et mes amis se désolent de fréquenter quelqu'un qui ne souhaite plus profiter de tout ce que Paris offre d'unique. Ils commencent à douter de ma santé mentale ainsi que celle de mon mari, qui, fort heureusement, est aussi tordu que moi.
Maintenant, grâce au T.G.V., nous sommes à deux heures dix de la capitale. Normalement je lis pendant un quart d'heure et dors pendant le reste du trajet. Curieusement, cette fois-ci je n'avais pas sommeil. Probablement à cause de l'inquiétude occasionnée par une Japonaise,
assise en face de moi. Au début je ne faisais pas vraiment attention : elle était tout simplement très jolie avec beaucoup de cheveux. Tout allait bien, le T.G.V. ronronnait et la Japonaise photographiait les lignes à haute tension. Je trouvais cela étrange, mais pas vraiment inquiétant. Puis elle a attaché ses cheveux, fermé les yeux, et là, j'ai eu peur. Une fois sa chevelure dégagée, on voyait une quantité anormale de fils, et de boîtiers suspendus un peu partout. Je me suis demandé s'il ne s'agissait pas d'une sorte de "life support machine" (je suis désolée, je ne trouve pas le mot en français,) personnel. Les Japonais ont tellement inventé, il ne sont plus à une surprise près. Alors impossible de lire, impossible de dormir. Impossible également de me lever pour prendre son pouls. J'étais fascinée, hypnotisée par cette jeune femme dont les dernières volontés allaient prendre la forme, pour la moins insolite, des pylônes du Morvan.
Heureusement, les contrôleurs existent encore, et c'est lui qui l'a réveillée, tout doucement, comme dans un conte de fée. Elle a regardé ce prince charmant ferroviaire avec des yeux très doux et pour le remercier d'avoir si joliment poinçonné son billet elle a relâché ses cheveux, d'un seul coup, inondant le compartiment d'un rideau soyeux, occultant ainsi toutes sources d'angoisse.
Mais je n'arrivais plus à trouver le sommeil. Alors, comme dans mes nuits d'insomnies les plus réussies, J'ai commencé à écrire. Dans ma tête. Lorsque nous 
sommes arrivés à la Gare de Lyon, j'avais au moins dix pages, assez plaisantes, prêtes à trouver leur place. C'était mercredi dernier. Aujourd'hui nous sommes mardi. Ces pages sont toujours dans ma tête.
La Japonaise aussi.
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